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Problématique et appel à communications


Les nombreuses questions engagées peuvent être provisoirement regroupées autour de trois objets : la notion de parcours professionnalisant, la conception des dispositifs et des formes de travail conjoint, les finalités et les modalités des processus délibératifs.

Les communications pourront choisir une entrée, ou proposer d’articuler plusieurs questions. La présentation qui suit ne constitue donc pas une conception définitive de l’organisation, qui se dessinera aussi en fonction des retours.

1 - Parcours de professionnalisation (tours, détours et tournants)

Entre plaisir et injonction à se former et à apprendre tout au long de la vie, la formation professionnelle est plurielle, initiale, promotionnelle et continue, individuelle mais aussi sociale et sociétale. Dans cette perspective globale et complexe, le parcours de professionnalisation est à la fois l’objet problématique, le projet de chacun et celui du collectif. Il configure les tours et les détours singuliers, les jeux des acteurs, les enjeux des ingénieries de formation et les stratégies des organisations.

Dans ces tours et détours, une confrontation avec la réalité peut engager la personne en formation à confirmer son choix de métier, ou à le réviser. L’abandon est ainsi parfois choisi, mais il faut souligner aussi que rester, et continuer, est tout autant une décision, qu’il s’agirait aussi de délibérer. Tel serait l’enjeu que les formateurs ont à soutenir, et la personne en formation à élaborer : réussir sans abandonner, ou réussir un abandon sans abandonner la réussite.

Ainsi, y-a-t-il des moments cruciaux dans le parcours de professionnalisation, moments de rencontre d’une « réalité », de prise de conscience, de délibération, de choix ? En quoi les modalités d’orientation et de recrutement, ou encore les évaluations, influencent-elles les parcours ? Du point de vue des dispositifs institutionnels et pédagogiques, comment les termes des textes règlementaires sur la professionnalisation ouvrent-ils le jeu possible des acteurs ? Qui construit la norme professionnelle ? Comment les acteurs, en fonction de leurs statuts, de leurs places, de leurs marges de manœuvre et de leur stratégie, s’en emparent-ils ?

La diversité des acteurs est à l’origine d’un ensemble de problématiques où se nouent, singularité et altérité. Quelle place y trouve la personne en formation et comment s’approprie ou se ré-approprie-t-elle la formation, sa formation ? Quels processus de déclinaison singulière, de résistance, de contournement, de décrochage, d’éloignement, de raccrochage sont en jeu, se dévoilent ou se dessinent ?

La réussite de cette traversée appelle, selon les initiateurs de ce colloque, un travail conjoint entre les « partenaires », et une dynamique collective qu’il s’agit aussi d’interroger :

2 - Les dispositifs inventés et les formes de travail conjoint
Les questions relatives à l’alternance et à l’accompagnement sont en effet convoquées par la prise en compte du point de vue des formateurs, des enseignants et des universitaires, des tuteurs et de tous les professionnels intervenant en formation. Quels sont les liens entre un dispositif de formation initiale et le professionnel de terrain ? Quelles formes d’alternance sont développées et comment accompagner la transformation de l’expérience en acte de formation ? Quelles stratégies et quelles ingénieries, quelles formes de travail peut-on mobiliser (et potentialiser) à partir d’une telle pensée des parcours de professionnalisation ? Plusieurs entrées ou axes sont possibles :

Stratégie et ingénierie des dispositifs de professionnalisation
En 1985, le terme d’ingénierie est introduit dans le champ de la formation des adultes. L’ingénierie englobe différents domaines et pratiques, liés à l’innovation, au projet et à la construction d’une action de formation, d’un dispositif, d’un système de formation distinguant et relevant les boucles de rétroactions entre les moments qui la composent. Notion non stabilisée, elle est régulièrement travaillée depuis la fin des années 1990 dans différents colloques suivis de publications Dans la continuité des travaux précédents reliant avec ingéniosité, ingénierie, innovation et construction collective, cet axe est ouvert aux contributions portant sur les enjeux collectifs de la réussite des parcours de professionnalisation, les dimensions stratégiques du pilotage et de la conception des ingénieries politiques, de formation et pédagogiques ainsi qu’aux contributions s’intéressant aux enjeux individuels, aux tactiques des acteurs, sujets engagés en formation où dans la formation, et quelle que soit leur place (maître d’ouvrage, maître d’œuvre, coordinateur pédagogique etc.). Du point de vue scientifique, cet axe vise à développer la dimension stratégique de l’ingénierie reliant opportunément conception et évaluation des dispositifs, du point de vue politique (Etat, collectivités territoriales, directions), organisationnel (ressources humaines, qualité, etc.) et humain (épanouissement personnel, réussite et bien-être au travail).

Mais on peut aussi aborder les dispositifs autrement. Ainsi certaines potentialités du numérique permettent de mettre en place des dispositifs pédagogiques qui réaménagent le rapport à la formation.

La formation professionnelle à l’ère du numérique
Les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) transforment les pratiques professionnelles des employés et des entrepreneurs. Elles transforment également et profondément les temps, les outils et les pratiques pédagogiques ou formatives.

Du point de vue scientifique, cet axe doit permettre d’approfondir les réflexions et les travaux interrogeant et analysant l’impact de ces nouvelles technologies sur les dispositifs de formation professionnelle.

Cet axe est ainsi ouvert aux contributions portant sur les nouvelles dimensions temporelles et spatiales; sur les nouveaux rythmes de l’alternance ; sur le positionnement, le rôle des différents acteurs engagés dans le processus de formation ; sur les nouvelles démarches pédagogiques ; sur les exclusions d’individus ou de champs de savoirs; sur les potentialités de participation et de réflexivité ; sur les croisements de capacités ou compétences ; qu’offrent, suggèrent ou imposent ces NTIC.

Travailler ensemble pour (se) former

La prise en compte de parcours dans leurs singulières inflexions implique en tout état de cause une autre façon de former ou plutôt d’accompagner la formation professionnelle. Les pratiques de formation et/ou d’éducation relevant d’un travailler ensemble ne sont pas nouvelles mais elles sont peu explorées du point de vue scientifique. Les récits d’expérience des étudiants et des apprentis, certaines recherches aussi, dévoilent une pluralité de formes instituantes et instituées : tutorat, compagnonnage, engagements singuliers des enseignants, des formateurs, des usagers, des résidents, des tuteurs, particularités de la formation entre pairs… Un intérêt particulier est porté aux contributions traitant de l’articulation entre les disciplines, de la collaboration entre les acteurs : apprentis, étudiants, tuteurs, formateurs, enseignants, universitaires, mais aussi patients, usagers, clients, ou encore associations, organisations et institutions. Ce, dans des situations telles que l’orientation, le recrutement, la formation, le tutorat, ou l’évaluation, dans différents espaces de formation (institut de formation, service, atelier, chantier etc.) entre les disciplines et les unités d’enseignements (par exemple, les articulations entre dispositif et mise en œuvre locale), entre les espaces, avec les partenaires. Une des hypothèses que se propose d’étudier cet axe est que ces différentes manières de travailler ensemble favorisent les parcours réussis de professionnalisation. Par quelles formes de relations interpersonnelles, le formateur, le professionnel, partagent-t-ils avec celui qui se professionnalise le pouvoir de former en lui donnant l’opportunité de se constituer en tant qu’autre professionnel (pouvoir et altérité, autonomie et coopération) ?

Il s’agit enfin d’interroger les modalités d’agir de cette dynamique conjointe, dont on a fait l’hypothèse, que pour favoriser la réussite en formation, elle devait permettre d’engager des processus délibératifs, à la fois au sein d’une équipe, et dans un accompagnement :


3 - Finalités, modalités, éthique et épistémologie des processus délibératifs
La finalité éthique d’autonomisation - ou d’émancipation – appelle un travail conjoint dont la modalité est interdisciplinaire, avec différentes manières de travailler ensemble (mutualisation, coordination, concertation, conseils - d’école, de labo, pédagogique …-, projets) qui dessinent une épistémologie de l’action concertée.

L’interdisciplinarité : finalités, obstacles, conditions
Quels peuvent être les arguments en faveur d’un travail interdisciplinaire dans une action conjointe ou un « travailler ensemble » ? Pourquoi ne s’inscrivent-ils pas aisément dans les actes ? Quels peuvent être les obstacles et les résistances à des pratiques interdisciplinaires ? Des analyses de fonctionnements institutionnels pourront être confrontées (on pense aux maisons de santé pluridisciplinaires).

Pourquoi et comment soutenir des processus délibératifs ?
Quels sont les arguments en faveur d’un travail conjoint en vue de soutenir des processus délibératifs : éthiques, pragmatiques, économiques ? Présupposent-ils un modèle « politique » ? Comment se confrontent dans l’idéal décisionnaire un modèle « démocratique » et un modèle individualiste sur-responsabilisant ?
Quelles représentations se fait-on et quelles théorisations peut-on confronter, d’un processus délibératif ? L’analyse de ce qui se joue dans un choix professionnel peut permettre d’ouvrir sur des dimensions telles que : approches éthiques (la prise en compte du choix de l’autre), axiologiques (conflits de valeurs, inter-culturalité) linguistiques (l’interlocution), historiques (modèles de formation)… Quels exemples de travail sur des conflits ou des malentendus, mais aussi quelles pratiques d’élaborations de décisions, peut-on analyser ? Quelles interprétations et quelles théorisations peut-on en proposer ?

Epistémologie de l’agir en formation
Enfin, cette réflexion pourra s’étendre à une perspective plus épistémologique, au sein de laquelle seront bienvenus les questionnements tant relatifs à la nature, à la place et aux usages des savoirs en formation qu’à une prise de champ vis-à-vis des implicites scientifiques et techniques mobilisés pour concevoir, penser et dire la formation (recrudescence ou oubli relatif de certains concepts, emprunt de savoirs et de vocabulaire entre champs disciplinaires ou sociaux, place et influence de la recherche - et laquelle - sur l’évolution des dispositifs de formation etc.). Les concepts d’une épistémologie de l’action en formation pourront être l’objet de propositions et d’analyses (coopération, délibération, décision, accompagnement…)